Changez des vies grâce à votre Zakat al maal (impôt sur la richesse) tout en purifiant vos biens.

QU’EST-CE QUE LA ZAKAT ? 

Quelle est la signification de la Zakat ?

Elle signifie en arabe purification, croissance et bénédiction.

Donc elle représente une purification, une croissance et une bénédiction des biens du riche, qui l’acquitte, comme elle représente une purification de son cœur et une croissance de sa foi.

De même elle représente pour le pauvre, qui la reçoit, une croissance financière et spirituelle.

La Zakat n’est pas du tout une réduction des biens comme ce que peuvent penser certains musulmans qui la négligent. En plus, elle représente, aussi, un indicateur de la grande foi de celui qui l’acquitte, car cela montre qu’il croit vraiment en Dieu, en sa promesse de croissance, et au jour dernier de la récompense, sinon il ne l’acquitte pas.

En même temps, la Zakat est une purification et une bénédiction de la société se traduisant par une solidarité, une fraternité et une paix sociale entre les riches et les pauvres.

Qui est assujetti à la Zakat ?

Tout musulman pubère raisonnable, homme ou femme, possédant pendant une année lunaire le Nissab (le minimum de biens rendant la Zakat obligatoire) en plus de ses besoins habituels (loyer, électricité, gaz, nourriture, habillement, …).

Mais la majorité (Malikite, Chafi’ite, Hanbalite) pense que l’impubère et l’irraisonnable riches sont assujettis, eux aussi, à la Zakat.

Il faut savoir aussi que le fait de payer des taxes et des impôts à l’état ne dispense pas le musulman d’acquitter sa Zakat.

Qui peut recevoir la Zakat ?

« Les aumônes sont destinées aux pauvres, aux nécessiteux, à ceux qui sont chargés de la collecter, à ceux dont les cœurs sont à gagner, au rachat des captifs, aux insolvables, à ceux qui se consacrent à la cause d’Allâh et aux voyageurs. »

 

  1. Le nécessiteux (sans ressources);
  2. Le pauvre (avec des ressources insuffisantes pour vivre dignement);
  3. Ceux qui récoltent la zakat.
  4. Le surendetté (ne trouvant pas de quoi rembourser sa dette);
  5. Au service de Dieu
  6. L’étranger de passage (qui est dans le besoin même s’il était riche dans son pays.
  7.  Délier les jougs
  8. À ceux dont les coeurs sont à gagner
Comment déterminer une année de Zakat ?

Si par exemple une personne atteint le Nissab (85 g d’or 24 carats) le 17 Ramadan de l’année passée, alors elle doit acquitter la zakat le 17 Ramadan de l’année actuelle si la somme est toujours supérieure ou égale au Nissab à cette date. Donc acquitter la Zakat au mois de Moharram n’est pas une nécessité sauf si le Nissab a été acquis en ce mois.

La femme doit-elle acquitter la Zakat de ses bijoux en or dépassant le Nissab ?

L’unanimité des savants considèrent qu’il n’y a pas de zakat si les bijoux ne dépassent pas le seuil et ceux qui ne sont pas en or ou en argent, comme les bijoux en diamants ou pierres précieuses.

Les savants ont divergé sur les bijoux en or et en argent qui ont atteint le seuil :

  1. Les hanafites[1]: il est obligatoire de sortir la zakat sur les bijoux en or et en argent.
  2. Les malikites[2], les chafiites[3], les hanbalites[4]: il n’est pas obligatoire de sortir la zakat sur les bijoux qui sont utilisés de façon permise pour s’embellir, mais il est obligatoire de payer la zakat sur les bijoux utilisés de façon non permise ainsi que les bijoux destinés à la vente ou à la thésaurisation, ainsi que les bijoux inutilisables car cassés.

La majorité des savants ne rendent pas obligatoire de payer la zakat sur les bijoux en or et argent s’ils ne sont pas à but commerciale en se basant sur la preuve :

Le prophète ﷺ à dit « pas de zakat sur les bijoux »[5]

[1] فتح القدير: 524/1

[2] الدسوقي: 460/1

[3] المجموع: 29/ 6

[4] كشاف القناع: 272/ 2

[5] At tirmidhi 636

Quel est le statut de celui qui n'acquitte pas la Zakat ?
  • Ne pas acquitter la Zakat est un grand péché en Islam
  • Des versets coraniques et des hadiths prophétiques ont cité le châtiment du négligent de la Zakat notamment le C9-V34/35.
  • Pour moi le musulman qui ne s’acquitte pas de la Zakat est un voleur. En général, le voleur vole les riches et celui-ci vole les pauvres et nourrit sa femme et ses enfants par cet argent volé. Que Dieu guide Ses serviteurs !

COMMENT CALCULER SA ZAKAT ET QUAND LA SORTIR? 

Comment calculer la valeur de la Zakat ?

Le taux à appliquer pour les billets bancaires est 2,5% (ou 0,025). Donc la somme nette restant à la fin de l’année lunaire doit être multipliée par 0,025.

Exemple : pour une somme nette après une année de 4000 € :
4000 € x 0,025 = 100 (la Zakat = 100€).

Quelle est la valeur du Nissab ?

Pour les billets bancaires, le Nissab est égal à la valeur de 85 grammes d’or (24 carats). Comme le cours de l’or est variable, le Nissab l’est aussi. Par exemple, pour l’année 1439 de l’hégire (2017/2018), le Nissab a été fixé à 2986 euros. (Certains sites donnent le cours officiel de l’or 24 carats comme la banque de France).

Je n'ai pas versé ma Zakat plusieurs années, que dois-je faire ?

L’unanimité des savants considèrent qu’il est obligatoire de sortir la zakat pour les années passées.

La majorité[1] des savants considèrent que l’on devra verser la même quantité de zakat pour toutes les années, c’est-à-dire qu’une personne qui a possédé 10 000€ durant 10 ans sans jamais payer la zakat versera 2500€ (250€ x 10 ans)

Une minorité[2] de savants considèrent qu’elle pourra réduire la somme de la zakat chaque année c’est-à-dire qu’une personne qui a possédé 10 000€ durant 10 ans sans jamais payer la zakat versera (2,5% de 10000€) soit 250€ pour la première année, puis (2,5% de 9750€) soit 243,75€ pour la seconde année, puis (2,5% de 9506€) soit 237,66€ pour la troisième année etc…

[1] المغني: 679/2

المجموع للنووي: 337/5

المحلي: 87/6

Est-il possible d'avancer la date d'acquittement de la Zakat ?

L’unanimité des savants interdisent de sortir la zakat pour celui n’a pas atteint le seuil.

Les savants ont divergé sur la possibilité de sortir la zakat avant son échéance :

  1. Les hanafites[1]: il est autorisé de sortir plusieurs années de zakat
  2. Les malikites[2]: il est interdit de verser sa zakat en avance, sauf pour la zakat sur l’or et l’argent et pour les bestiaux lorsqu’il n’y a personne pour récolter la zakat, il est possible de la verset un mois en avance de son échéance
  3. Les chafiites[3]: il est autorisé pour le commerçant de sortir plusieurs années de sa zakat en avance, pour les autres zakats, il n’est possible d’avancer la sortie que d’une seule année, sous condition d’avoir atteint le seuil
  4. Les hanbalites[4]: il est autorisé de sortir deux années de zakat en avance

La majorité des savants autorisent de sortir la zakat avant son échéance pour celui qui a atteint le seuil, en se basant sur la preuve :

Le Prophète ﷺ avait demandé à al-Abbas de payer par anticipation la zakat de deux années[5]

[1] البدائع: 50/ 2

[2] الدسوقي: 501/1

[3] المجموع: 139/ 6

[4] كشاف القناع: 310/ 2

[5] At tirmidhi 678, Abou daoud 1624, Ibn majah 1795

 

Est-il possible de donner sa zakat à ses proches ?

Il n’est pas possible de la donner à ses ascendants (son père, sa mère et ses grands-parents), à ses descendants (son fils, sa fille et ses petits-enfants) et à sa femme. Car l’homme doit prendre en charge sa femme, ses enfants et ses parents pauvres s’il en est capable. Du coup, donner la Zakat à ces trois catégories revient à la donner à sa propre personne.

Certains Savants autorisent à la femme riche de donner sa Zakat à son mari pauvre car elle n’est pas tenue de le prendre en charge. De même, certains hadiths authentiques vont dans ce sens. Mais d’autres Savants (comme Abou Hanifah) n’autorisent pas cela car la femme va, finalement, se nourrir de son propre argent chez son mari, or la Zakat ne lui est pas autorisée vu qu’elle n’est pas pauvre.

D’après la majorité, il est autorisé de la donner aux pauvres parmi ses frères, ses sœurs, ses neveux, ses oncles, ses tantes et ses cousins. A ce moment-là, elle apportera, d’après un hadith de Bukhari et Muslim, un salaire double, celui de l’aumône et celui du lien familial.

Contrairement à la Zakat obligatoire, la Sadaqah (aumône surérogatoire : sunnah) peut être donnée à tous les proches (mari, femme, ascendants, descendants et les autres).

Comment déterminer une année de Zakat ?

Si par exemple une personne atteint le Nissab (85 g d’or 24 carats) le 17 Ramadan de l’année passée, alors elle doit acquitter la zakat le 17 Ramadan de l’année actuelle si la somme est toujours supérieure ou égale au Nissab à cette date. Donc acquitter la Zakat au mois de Moharram n’est pas une nécessité sauf si le Nissab a été acquis en ce mois.

La somme épargnée doit-elle rester, toute l'année, supérieure ou égale au Nissab ?

La majorité exige que la somme reste supérieure ou égale au Nissab pendant toute l’année lunaire. Si la somme devient inférieure au Nissab, il faut attendre le jour où celle-ci le dépasse de nouveau pour commencer une année au bout de laquelle la Zakat sera acquittée.

Par contre les Hanafites exigent la Zakat si au début et à la fin de l’année la somme est supérieure ou égale au Nissab, même si au cours de l’année le montant épargné a connu une baisse par rapport au Nissab.

OR OU ARGENT? 

Histoire de la monnaie fiduciaire et l'étalon-or

La monnaie fiduciaire, également appelée papier-monnaie, trouve ses origines dans la Chine de la dynastie Tang au 7ème siècle, bien qu’elle ne devienne véritablement courante qu’avec la dynastie Song au 11ème siècle, avec le Jiaozi, devenant ensuite le huizi, qui sont les premiers ancêtres du billet de banque moderne. En Europe, le concept de papier-monnaie a pris racine beaucoup plus tard, au 17ème siècle, avec l’essor du commerce et des banques. Les premiers billets de banque sont émis en 1661 par la Banque de Stockholm de Johann Palmstruch qui fait faillite, faute de réserves suffisantes. L’émission de billets de banque ne s’implante durablement qu’au 18e siècle.

Initialement, chaque billet de banque était censé représenter une part d’or détenue en réserve par l’institution émettrice. Ce système, connu sous le nom d’étalon-or, garantissait que les billets de banque pouvaient être échangés contre une quantité fixe d’or stockée dans cette dernière. Cela avait l’avantage d’apporter une stabilité et une confiance dans les échanges économiques, en maintenant comme monnaie l’or reconnu universellement comme une réserve de valeur fiable, tout en permettant de faciliter les transactions sans avoir à le transporter ou à se mettre en danger à le conserver soi-même.

L'étalon-or et les accords de Bretton Woods

L’étalon-or a dominé le système monétaire international jusqu’au début du 20ème siècle. Cependant, les deux guerres mondiales et la Grande Dépression ont mis à rude épreuve ce système, conduisant à sa suspension temporaire. Après la Seconde Guerre mondiale, les accords de Bretton Woods de 1944 ont tenté de rétablir une forme de stabilité en instituant un nouveau système où le dollar américain, lié à l’or, servait de référence mondiale.

Selon ces accords, toutes les autres monnaies étaient fixées par rapport au dollar, au vu de la stabilité de l’économie américaine qui sort de la guerre en étant considérée comme l’économie la plus forte du monde. Ce dollar était lui-même convertible en or à un taux fixe de 35 dollars l’once. Tout ce système visait à stabiliser les taux de change et à encourager la reconstruction économique mondiale. En résumé, les monnaies étaient indexées au dollar, et le dollar était la seule monnaie qui restait indexée à l’or.

Cependant, au fil du temps, les réserves d’or des États-Unis se sont érodées en raison de déficits commerciaux et budgétaires croissants, ce qui a finalement conduit à l’abandon de la convertibilité du dollar en or le 15 août 1971 sous l’administration de Richard Nixon, décision qui a provoqué la disparition de l’or en tant que monnaie d’échange.

La fin de l'étalon-or et la monnaie fiduciaire moderne

La fin de l’étalon-or en 1971 a donc marqué une transition cruciale dans l’histoire économique mondiale. En abandonnant la convertibilité du dollar américain en or, les États-Unis ont mis fin à un système monétaire qui avait dominé les échanges internationaux pendant des décennies. Ce passage a initié l’ère de la monnaie fiduciaire moderne, une ère où les devises ne sont plus adossées à des réserves d’or physiques, mais plutôt à la confiance des acteurs économiques dans les gouvernements et les institutions qui émettent ces devises, ce qui leur donne une valeur que l’on pourrait qualifier de virtuelle. Désormais les États ne sont plus limités par leurs réserves d’or et peuvent créer de la monnaie de manière flexible, presque ex nihilo, dont la valeur va dépendre de la confiance des autres institutions en leur stabilité politique et économique.

Et c’est là que se pose toute la problématique par rapport à la Zakat : comment évaluer et calculer cette obligation religieuse dans un contexte où la monnaie n’a plus de valeur intrinsèque liée à une matière première comme l’or ou l’argent, là où le Législateur a justement rattaché cette prescription à ces matières ? Faut-il encore donner la Zakat sur la monnaie dans ce contexte ? Si oui, faut-il indexer la valeur de la monnaie sur l’or ou bien l’argent ? Ce sont ces questions qui ont suscité des débats parmi les savants contemporains.

Divergence des savants contemporains à propos de la Zakat sur la monnaie fiduciaire

Avec l’avènement de la monnaie fiduciaire moderne, les savants contemporains ont donc été confrontés à la question de comment considérer cette monnaie « virtuelle » pour la Zakat ? 

Une première opinion s’est posée, traitant de rattacher ce jugement au jugement le plus proche connu dans la jurisprudence, à savoir Zakat al-Fulūs, ou la Zakat sur les pièces de cuivre. En effet, dans les différents califats islamiques et particulièrement depuis le califat ommeyyade de ‘Abdul-Malik ibn Marwan (calife de l’an 65 à l’an 86 de l’Hégire), des pièces de cuivre étaient utilisées dans les petites transactions à la place de l’or et de l’argent, difficiles à fragmenter (l’équivalent donc des centimes de notre époque). Or la majorité des savants se sont accordés à dire que la Zakat n’était pas imposée sur les pièces en cuivre à moins qu’elles ne soient utilisées elles-mêmes comme marchandise. Néanmoins, l’opinion de rattacher le jugement de la monnaie fiduciaire à celui des pièces en cuivre, bien que défendue par quelques savants de cette ère, a vite été abandonnée pour ce qui tend aujourd’hui à une certaine forme de consensus, au vu du fait que la conséquence de cet avis serait de ne plus avoir à donner la zakat sur toute somme qui serait possédée en monnaie, ce qui affecterait grandement ce pilier de l’Islam et la finalité de la législation qu’il apporte.

Aussi, c’est pour cette raison que les contemporains se sont quasiment tous accordés sur le fait d’indexer la monnaie fiduciaire sur l’or ou l’argent, mais ont donc divergé entre les deux métaux.

Cette divergence de valeurs reste donc à élucider pour s’acquitter correctement de cette obligation. Est-il préférable de se baser sur l’or ou l’argent, ou cela importe-t-il peu ? Enfin, quelle serait l’utilité de se baser sur l’argent plutôt que sur l’or pour la communauté ?

Les différents Nissab et leurs preuves

Tout d’abord, commençons par un rappel rapide des différents seuils

  1. L’Or : Le seuil de la zakat pour l’or est fixé à 20 dinar, chaque dinar étant environ l’équivalent de 4,25 g d’or, le total faisant environ 85 grammes d’or.Preuve : Abu Dawud rapporte dans ses Sunan (n°1572) d’Ali (qu’Allah soit satisfait de lui), que le Prophète (paix et bénédictions d’Allah soient sur lui) a dit : « Tu n’as rien à payer (de zakat) sur l’or jusqu’à ce que tu possèdes vingt dinars. Lorsque tu possèdes vingt dinars et qu’une année lunaire (hawl) s’est écoulée, tu dois payer un demi-dinar en zakat. Pour toute quantité supplémentaire, la zakat est calculée proportionnellement. » (N.B. : ce hadith est considéré faible par certains savants comme on le mentionnera par la suite)
  2. L’Argent : Pour l’argent, le seuil est de 200 dirhams (environ 595 grammes d’argent).
Preuve : D’après Jabir, le Messager d’Allah (paix et bénédictions d’Allah soient sur lui) a dit : « Il n’y a pas de zakat sur moins de cinq awāq de monnaie » Rapporté par Muslim, et Al-Bukhari rapporte une version similaire d’Abu Sa’id Al-Khudri.

Une uqiyya (sing. de “awāq”) est équivalente à 40 dirham, cinq awāq donne donc 200 dirham.

Ainsi, le seuil de la Zakat de l’or est de 85 grammes d’or. Or si l’on se base sur l’indice 22 carats comme c’est préconisé (voir ci-après), avec le cours de l’or à la date de l’écriture de cet article, on en vient à la valeur de 64,20 euros par gramme. Le nissab de l’or est donc équivalent à 5454,5€.

Quant au seuil de la Zakat de l’argent, son cours à la date de l’écriture de cet article est de 0,92€. Ce qui nous donne un Nissab de 547,4€.

Est-il préférable de se baser sur l’or, l’argent, ou peu importe, et pourquoi ?

Après ce simple calcul, il est évident que l’on constate la large différence entre le Nissab de l’argent et celui de l’or qui lui est dix fois supérieur. Viens donc la question que l’on se pose, à savoir quel est le mieux entre se considérer imposable dès lors qu’on a dépassé le seuil de l’argent, ou de ne se considérer comme tel qu’après avoir dépassé celui de l’or ?

Voici exposées de manière concise les positions des savants défendant les deux avis dans l’école malikite.

  1. Avis défendant l’Or en référence et leurs arguments :

Le fait de prendre l’or comme référence de la Zakat est notamment la position des savants contemporains de Tunisie.

Le savant zaytunien shaykh Al-Habib Ibn Tahir dit dans son encyclopédie “Al-Fiqh al-Maliki wa Adillatuh” (vol. 2 p. 36-37) :

“La zakat est due sur les pièces de monnaie et les billets de banque utilisés par les gens, sous deux conditions : qu’ils atteignent le seuil (nisab) et qu’une année lunaire complète (hawl) se soit écoulée après les avoir thésaurisés.

De nombreux savants de Tunisie ont choisi d’évaluer le seuil (nisab) de la zakat en utilisant l’or plutôt que l’argent, car la valeur de l’argent est devenue beaucoup plus basse que celle de l’or. Comme le seuil de la zakat est considéré comme le minimum de richesse en droit islamique, celui qui possède le seuil en argent n’est pas considéré comme riche en raison de la faible valeur de l’argent ; il est même admissible à recevoir la zakat, car le pauvre est celui qui ne possède pas de quoi subvenir à ses besoins annuels. Or la valeur du seuil en argent ne suffit pas pour couvrir les besoins annuels.

Comme l’or ne peut être utilisé comme monnaie ou bijou sans l’ajout d’un pourcentage de cuivre ou d’un autre métal pour le rendre solide et utilisable, les savants malikites (…) ont considéré cet ajout négligeable et l’ont traité comme de l’or pur. Cependant, ils ont exigé que cette addition d’alliage soit minime, de sorte qu’elle ne dégrade pas l’or mélangé en le rabaissant en dessous du niveau de l’or pur, et ils l’ont estimée à un dixième au maximum. Il en est de même pour l’argent.

Sur cette base, l’or utilisé pour évaluer les billets de banque utilisés par les gens est celui dont le pourcentage de mélange ne dépasse pas un dixième. L’or couramment utilisé, qui contient ce pourcentage, est ce que l’on appelle l’or de 22 carats.”

On apprend donc des propos du shaykh Al-Habib Ibn Tahar ce qui suit :

  • La valeur de l’or est généralement plus stable et moins sujette aux fluctuations du marché par rapport à l’argent.
  • La valeur de l’argent est selon lui ainsi que les savants de Tunisie trop basse pour être un indicateur fiable de richesse, et rendrait même les pauvres imposables.
  • Le nissab de l’argent ne couvre pas les besoins annuels et laisse son propriétaire dans la précarité, or le nissab est censé être un indicateur de richesse, ce qui est un argument pour l’or.
  • L’or utilisé pour la zakat doit avoir un pourcentage de mélange inférieur à un dixième, ce qui correspond à l’or de 22 carats.
  • Les savants malikites considèrent l’ajout d’alliage négligeable tant qu’il reste inférieur à un dixième.
  • On indexe donc la valeur de la monnaie fiduciaire et des billets de banque à la valeur de l’or de 22 carats.

  1. Avis défendant l’Argent en référence et leurs arguments :

    La plupart des savants contemporains du Maroc notamment défendent l’avis de prendre en référence l’argent pour la Zakat.

Le savant de Fès shaykh Muhammad At-Tawil – qu’Allah lui fasse miséricorde – qui a dit : « Il est nécessaire d’évaluer la monnaie en circulation pour connaître son seuil, ce sur quoi sont unanimes ceux qui disent qu’elle est soumise à la zakat, mais ils diffèrent quant à la base de l’évaluation, est-ce en or ou en argent ou autre ?

La première tendance, qui est la vérité et la tendance correcte, est de l’évaluer en fonction de l’argent, soit un poids de 624 grammes en tenant compte de la divergence sur la mesure du dirham, est-ce 3,12 grammes ou 2,975 grammes ? Si quelqu’un possède des billets de banque équivalant au seuil de l’argent, il doit s’acquitter de la zakat, même s’il n’atteint pas le seuil de l’or qui est de 85 grammes. » Cette parole est mentionnée par son élève Mohamed Lamraoui dans son livre « Al-Mubin ‘an Adillat Al-Murshid Al-Mu’in » préfacé par le Dr. Muhammad At-Tawil – qu’Allah lui fasse miséricorde – lui-même et Dr. Farid Al-Ansari – qu’Allah lui fasse miséricorde ; p. 275.

Le shaykh Sidi Al-Yazid Ar-Radi, président du conseil scientifique (Majlis ‘ilmi) de Taroudant a écrit dans son livre « Zakât Rawâtib al-Muwadhafîn wa Kasb Ashâb al-Mihan al-Hurra” (La Zakat sur les salaires des employés et les gains des professions libérales) à la page 13 ce qui suit :

« La majorité des chercheurs contemporains estiment que le seuil de la zakat sur la monnaie en circulation doit être basé sur l’argent, c’est-à-dire que le seuil est ce qui atteint la valeur de 595 grammes d’argent. Cette opinion me semble plus solide pour les raisons suivantes :

Les textes législatifs qui déterminent le seuil de l’argent à cinq awaq ou deux cents dirhams sont plus nombreux et plus authentiques, tandis que les textes qui fixent le seuil de l’or à vingt mithqals ou vingt dinars sont peu nombreux et, en plus de leur rareté, leurs chaînes de transmission comportent des défauts.

Ibn Abdil Barr a dit : « Il n’est rien de fiable rapporté du Prophète ﷺ concernant l’or par des narrateurs de confiance. » An-Nawawi a dit : « Il n’y a pas de mention claire du seuil de l’or dans les récits authentiques, bien qu’il y ait des hadiths qui le fixent à vingt mithqals, mais ils sont faibles. » Ibn Taymiyyah a dit en parlant de la classification de Malik des hadiths sur la zakat dans le Muwatta : « Malik – qu’Allah lui fasse miséricorde – commence le livre de la zakat dans le Muwatta par le hadith d’Abu Sa’id car c’est le plus authentique dans ce domaine, et c’est également ce qu’a fait Muslim dans son Sahih. Ce hadith mentionne le seuil de l’argent, des chameaux, des grains et des fruits, puis du bétail et de la monnaie…, puis mentionne le seuil de l’or, mais la preuve pour cela est plus faible que pour l’argent, c’est pourquoi il l’a mis en dernier. » (3)

Or nul doute que ce qui a des chaînes de transmission sûres et atteint le plus haut niveau d’authenticité doit être priorisé en cas de conflit et de sélection par rapport à ce qui a des chaînes de transmission sujettes à débat.

De plus, évaluer en fonction de l’argent permet au donateur de choisir la précaution pour sa religion, car celui qui possède deux cents dirhams légaux – ou leur équivalent en monnaie – est considéré comme riche par la loi islamique et doit s’acquitter de la zakat. Or si nous l’exemptons de la zakat en prétendant qu’il n’a pas atteint le seuil basé sur la valeur de l’or, nous contredisons les textes clairs et explicites qui fixent le nissab selon l’argent, et nous prenons ainsi un risque et jouons avec le feu. »

On apprend donc des propos du shaykh Al-Habib Ben Tahar ce qui suit : 

  • Le savant shaykh Muhammad At-Tawil considère que la monnaie en circulation doit être évaluée en se basant sur l’argent.
  • Selon At-Tawil, le seuil de la zakat en argent est de 624 grammes, basé sur les divergences concernant le poids du dirham.
  • Il est ainsi nécessaire de s’acquitter de la zakat si la monnaie atteint le seuil de l’argent, même si elle n’atteint pas le seuil de l’or (85 grammes).
  • Le shaykh Sidi Al-Yazid Ar-Radi soutient que la majorité des chercheurs contemporains préfèrent également baser le seuil de la zakat sur l’argent, fixant ce seuil à 595 grammes.
  • Ar-Radi justifie cette position par la solidité des textes législatifs et la fiabilité des hadiths concernant l’argent.
  • Il souligne que les textes sur l’or sont rares et moins fiables, citant notamment Ibn Abdil Barr, An-Nawawi, et Ibn Taymiyyah.
  • Évaluer en fonction de l’argent est plus prudent religieusement, car selon les ahadith qui considèrent riche et soumis à la zakat toute personne possédant deux cents dirhams légaux ou leur équivalent, ne pas la donner expose à délaisser
Quelle serait l’utilité de se baser sur l’argent et non l’or pour la oumma ?

Des paroles des savants que nous avons pu lire précédemment, l’on comprend que si l’or est une référence admise et acceptée pour la Zakat, se baser sur l’argent pour déterminer le nisab de celle-ci présente plusieurs avantages pour l’individu comme pour la communauté dans son ensemble :

  1. L’argent permet d’augmenter le nombre de contributeurs, et ce car vu que l’argent a une valeur plus faible que l’or, plus de musulmans atteindront le seuil de richesse imposable et seront tenus de payer la zakat. Cela augmente le montant total collecté, permettant une aide plus pertinente et plus large qui couvre les besoins des nécessiteux et incite tout le monde à donner, quitte à créer un cercle vertueux.
  2. Se baser sur l’argent est une précaution : en l’adoptant, le musulman évite de manquer involontairement à cette obligation de la zakat en raison de l’utilisation d’un seuil de richesse plus élevé (celui de l’or) malgré l’existence de la divergence, ce qui ferait qu’il s’opposerait potentiellement aux textes qui le rendent imposable à partir du seul de l’argent.

    Allah sait mieux

AUTRE QUESTIONS

Je n'ai pas versé ma Zakat plusieurs années, que dois-je faire ?

L’unanimité des savants considèrent qu’il est obligatoire de sortir la zakat pour les années passées.

La majorité[1] des savants considèrent que l’on devra verser la même quantité de zakat pour toutes les années, c’est-à-dire qu’une personne qui a possédé 10 000€ durant 10 ans sans jamais payer la zakat versera 2500€ (250€ x 10 ans)

Une minorité[2] de savants considèrent qu’elle pourra réduire la somme de la zakat chaque année c’est-à-dire qu’une personne qui a possédé 10 000€ durant 10 ans sans jamais payer la zakat versera (2,5% de 10000€) soit 250€ pour la première année, puis (2,5% de 9750€) soit 243,75€ pour la seconde année, puis (2,5% de 9506€) soit 237,66€ pour la troisième année etc…

[1] المغني: 679/2

المجموع للنووي: 337/5

المحلي: 87/6

Est-il possible d'avancer la date d'acquittement de la Zakat ?

L’unanimité des savants interdisent de sortir la zakat pour celui n’a pas atteint le seuil.

Les savants ont divergé sur la possibilité de sortir la zakat avant son échéance :

  1. Les hanafites[1]: il est autorisé de sortir plusieurs années de zakat
  2. Les malikites[2]: il est interdit de verser sa zakat en avance, sauf pour la zakat sur l’or et l’argent et pour les bestiaux lorsqu’il n’y a personne pour récolter la zakat, il est possible de la verset un mois en avance de son échéance
  3. Les chafiites[3]: il est autorisé pour le commerçant de sortir plusieurs années de sa zakat en avance, pour les autres zakats, il n’est possible d’avancer la sortie que d’une seule année, sous condition d’avoir atteint le seuil
  4. Les hanbalites[4]: il est autorisé de sortir deux années de zakat en avance

La majorité des savants autorisent de sortir la zakat avant son échéance pour celui qui a atteint le seuil, en se basant sur la preuve :

Le Prophète ﷺ avait demandé à al-Abbas de payer par anticipation la zakat de deux années[5]

[1] البدائع: 50/ 2

[2] الدسوقي: 501/1

[3] المجموع: 139/ 6

[4] كشاف القناع: 310/ 2

[5] At tirmidhi 678, Abou daoud 1624, Ibn majah 1795

 

Est-il possible de donner sa zakat à ses proches ?

Il n’est pas possible de la donner à ses ascendants (son père, sa mère et ses grands-parents), à ses descendants (son fils, sa fille et ses petits-enfants) et à sa femme. Car l’homme doit prendre en charge sa femme, ses enfants et ses parents pauvres s’il en est capable. Du coup, donner la Zakat à ces trois catégories revient à la donner à sa propre personne.

Certains Savants autorisent à la femme riche de donner sa Zakat à son mari pauvre car elle n’est pas tenue de le prendre en charge. De même, certains hadiths authentiques vont dans ce sens. Mais d’autres Savants (comme Abou Hanifah) n’autorisent pas cela car la femme va, finalement, se nourrir de son propre argent chez son mari, or la Zakat ne lui est pas autorisée vu qu’elle n’est pas pauvre.

D’après la majorité, il est autorisé de la donner aux pauvres parmi ses frères, ses sœurs, ses neveux, ses oncles, ses tantes et ses cousins. A ce moment-là, elle apportera, d’après un hadith de Bukhari et Muslim, un salaire double, celui de l’aumône et celui du lien familial.

Contrairement à la Zakat obligatoire, la Sadaqah (aumône surérogatoire : sunnah) peut être donnée à tous les proches (mari, femme, ascendants, descendants et les autres).

La somme épargnée doit-elle rester, toute l'année, supérieure ou égale au Nissab ?

La majorité exige que la somme reste supérieure ou égale au Nissab pendant toute l’année lunaire. Si la somme devient inférieure au Nissab, il faut attendre le jour où celle-ci le dépasse de nouveau pour commencer une année au bout de laquelle la Zakat sera acquittée.

Par contre les Hanafites exigent la Zakat si au début et à la fin de l’année la somme est supérieure ou égale au Nissab, même si au cours de l’année le montant épargné a connu une baisse par rapport au Nissab.